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Cinéma du Réel 2012
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Zahad le rouge
dans le coma profond


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MessagePosté le: Dim Mar 11, 2012 10:37    Sujet du message: Répondre en citant

L'un de vous deux a pu récupérer un DVD? Carton, maintenant que tu as festivalscope, regarde les deux autres films de Yu guangyi, ils sont aussi forts.
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Tiny
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MessagePosté le: Lun Mar 12, 2012 15:26    Sujet du message: Répondre en citant

Trollope a écrit:
Tiny a écrit:
A voir:

APRES LE SILENCE - Ce qui n’est pas dit n’existe pas?
Vanina Vignal (France/Roumanie, 95’, 2012)

BACHELOR MOUNTAIN
Yu Guangyi (Chine, 95', 2011)


en voilà un qui doit mouiller Smile

j'ai pas compris Confused
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Tiny
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MessagePosté le: Lun Mar 12, 2012 15:27    Sujet du message: Répondre en citant

Zahad le rouge a écrit:
L'un de vous deux a pu récupérer un DVD? le yougo', maintenant que tu as festivalscope, regarde les deux autres films de Yu guangyi, ils sont aussi forts.

j'ai.
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Zahad le rouge
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MessagePosté le: Lun Mar 12, 2012 18:07    Sujet du message: Répondre en citant

oh! il me faut un dvd du yu guangyi si tu peux faire ça pour moi tu es mon héros ! Very Happy
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Tiny
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MessagePosté le: Lun Mar 12, 2012 18:45    Sujet du message: Répondre en citant

j'peux pas t'le faire mais je te le passerai à l'occasion.
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Zahad le rouge
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MessagePosté le: Lun Mar 12, 2012 19:13    Sujet du message: Répondre en citant

OUAIIIIIIS!!!!
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Trollope
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MessagePosté le: Mar Mar 13, 2012 3:43    Sujet du message: Répondre en citant

Quand est-ce qu'il est sur Asiatorrent?

KG, j'ai lâché l'affaire...
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Tiny
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MessagePosté le: Mar Mar 13, 2012 9:27    Sujet du message: Répondre en citant

Baldanders a écrit:
Tiny a écrit:
j'peux pas t'le faire mais je te le passerai à l'occasion.


Euh, c'est un toi qui vaut vous ou je peux aller me moucher ?

Very Happy zahad te le passera ou fera une copie. du moment que le dvd revient, vous faites ce que vous voulez.
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Baldanders
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MessagePosté le: Ven Mar 16, 2012 20:03    Sujet du message: Répondre en citant

A propos de "Découverte d'un principe en case 3" de Julien Meunier et Guillaume Massart, je suis tombé sur ça (dans "Godard par Godard, les années Karina") :

Cahiers. - On a l'impression que le sujet (de "Pierrot le fou", NdB) n'apparaît qu'une fois le film terminé. Pendant la projection, on se dit qu'il est là ou là et c'est à la fin qu'on s'aperçoit qu'il y avait un vrai sujet.

Godard. - Mais c'est le cinéma, cela. La vie s'organise. On ne sait pas très bien ce qu'on fera le lendemain, mais à la fin de la semaine on peut dire, devant le résultat : j'ai vécu, comme la Camille de Musset. On s'aperçoit alors qu'on ne badine pas non plus avec le cinéma. On voit quelqu'un dans la rue ; sur dix passants il y en a un que l'on regarde un peu plus longuement pour une raison ou pour une autre. Si c'est une fille parce qu'elle a les yeux comme ci, si c'est un type parce qu'il a l'air comme ça, et puis on filme sa vie. Un sujet s'en dégagera qui sera la personne elle-même, l'idée qu'elle se fait du monde et donc le monde final que cette idée crée, l'idée d'ensemble que cela provoque.
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Zahad le rouge
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MessagePosté le: Dim Mar 25, 2012 23:54    Sujet du message: Répondre en citant

Pour ceux que ça intéresse, Arte VOD, UniversCiné et Médiathèque-Numérique reprennent jusqu'au 3 mai Découverte d'un principe en case 3, suite à sa sélection au Cinéma du Réel (de même qu'une bonne partie du programme de la manifestation par ailleurs).

Trois adresses possibles pour voir ou revoir le film :

1. http://www.artevod.com/decouverte-principe-case-3

2. http://www.universcine.com/films/decouverte-d-un-principe-en-case-3

3. http://www.mediatheque-numerique.com/films/decouverte-d-un-principe-en-case-3


Pour ce dernier lien, je ne connaissais pas du tout, ça a l'air lié à des bibliothèques municipales, je ne sais pas comment ça marche...
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Carton
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MessagePosté le: Jeu Mar 29, 2012 19:36    Sujet du message: Répondre en citant

Bon, au lieu de perdre du temps à taper sur les critiques, autant profiter de l'espace ici pour écrire un peu sur les films.



Henry Hudson and his son, de Frederico Vladimir Strate Pezdirc.

Ça commence comme un cliché, un film de vacance en vhs d’une famille à la plage. Tout le monde va à l’eau et laisse la caméra filmer tout ça, laissée seule sur le sable. Ensuite le père demande au fils d’aller éteindre la caméra. L’enfant s’avance donc vers l’objectif et sort du champ sur la gauche, puis éteint la caméra. Le plan d’après, un entrepôt de musée s’est substitué à la plage, et l’enfant revient dans le champ, par la gauche encore, mais en jeune adulte. Dans l’ellipse, quelque chose comme deux décennies se sont écoulées, et l’enfant envoyé par son père vers la caméra revient en réalisateur.
Le film de Frederico Vladimir Strate Pezdirc peut paraître poseur, petit film un peu chiant de jeune artiste vidéaste, qui fait durer ses plans pour la frime et refuse de raconter simplement son truc, passe d’un support à un autre, change de procédé esthétique d’une scène à l’autre, paraît chercher son film à mesure qu’il avance et fait même état de ses essais ratés et de ses problèmes techniques (résolus par des sous titres très drôles ou un laisser aller aux effets réussis). Pourtant ce premier raccord est la preuve que quelque chose de bien plus fort que des caprices formels est en jeu dans le film. Le jeune réalisateur exprime d’emblée le fantasme que son père n’est pas seulement son géniteur, il est aussi celui qui l’a inventé réalisateur, et cette filiation magique va être explorée et interrogée par la suite. Surtout, Strate Pesdirc, et c’est là la réussite du film, va rendre la pareille à son père et le réinventer à son tour par les moyens du cinéma. Il transformera son dentiste de père, dans une très belle séquence finale, en explorateur aventurier, bravant les éléments dans le vacarme du vent déchaîné, et finalement le regarder comme il regardait plus tôt le visage de Henry Hudson, explorateur légendaire, figure paternelle puissante et mystérieuse, mort avec son fils durant une expédition dans le grand nord.
Faire surgir un lyrisme épique et sentimental d’une forme a priori austère et autocentrée, sur un sujet (le regard d’un fils sur son père, son désir de préserver et de renouveler sa dimension héroïque) qui me touche particulièrement, bon bin c’est pas rien et ce fut une belle surprise.



East Hastings Pharmacy, de Antoine Bourges.

Dans une pharmacie de Vancouver, des toxicomanes font la queue pour recevoir leur dose de méthadone. De l’autre côté du comptoir, derrière une vitre en plexiglas, une jeune pharmacienne s’acquitte le plus professionnellement possible de sa tache.
Tout le film travaille au développement précis d’un jeu de champ/contre-champ. Il définit deux espaces cohabitant mais bien distincts, la salle d’attente d’un côté, et le comptoir de la pharmacienne de l’autre, séparé par une vitre. La figure du champ/contre-champ est habituellement une figure du lien, ici elle sera celle de la séparation franche, de la rencontre impossible, et la durée des plans, le rythme du montage, construisent un monde immobile, immuable, une bulle (la vie, le bruit et le mouvement sont dehors, on les aperçoit au fond du plan comme une promesse ou une menace) un rapport de force qui parait implacable (le visage pâle, fermé et fragile de la pharmacienne pose bien ça, une ambiguïté entre le rôle social inflexible et une humanité qu’on devine sans peine).
Petit à petit, cette étanchéité va être questionnée par les évènements, les récits qui se forment et les petites évolutions de la parole (finement, on se met à appeler les patients par leurs prénoms), et par la mise en scène très subtile des reflets de la vitre qui vient inscrire le contre-champ sur le visage de la jeune femme, ainsi que l’insistance sur ce troisième type de plan, un plan serré sur la main de la pharmacienne qui passe par une petite ouverture pour donner la dose prescrite.
Dans un jeu méticuleux de répétitions et de variations, c’est toute une apparition difficile de bribes de rapports humains qui s’installe.

Par ailleurs, le dispositif de mise en scène (qu’il ne vaut mieux pas révéler trop tôt) questionne la distance entre fiction et documentaire. Ce questionnement est passionnant, mais presque extérieur au film qui installe une telle évidence de sa mise en scène et de son travail de représentation qu’il se place d’emblée en dehors de tout malentendu ou de griefs que l’on pourrait avoir face à un regard mal ajusté.
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Tiny
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MessagePosté le: Jeu Mar 29, 2012 19:45    Sujet du message: Répondre en citant

le yougo' a écrit:
qu’il se place d’emblée en dehors de tout malentendu ou de griefs que l’on pourrait avoir face à un regard mal ajusté.

faut pas pousser mémé là quand même. il est en plein dans le malentendu, cf les réactions contrastées dans la salle au moment du débat.
il sait bien ce qu'il fait en ne disant rien et il en joue.
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Carton
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MessagePosté le: Jeu Mar 29, 2012 19:57    Sujet du message: Répondre en citant

Tiny a écrit:

faut pas pousser mémé là quand même. il est en plein dans le malentendu, cf les réactions contrastées dans la salle au moment du débat.
il sait bien ce qu'il fait en ne disant rien et il en joue.


Non ce n'est pas du malentendu. Son dispositif lui permet une mise en scène rigoureuse sur des éléments très précis. La révélation de ce dispositif ne change strictement rien à ce qu'il réussit dans son film. De ce point de vue il ne joue sur aucun malentendu. Ce qu'on a vu est bien ce qu'il y avait à voir, aucun twist ne vient invalider le film. Les réactions dans la salle exprimaient une surprise, mais enfin ça ne remet pas du tout en cause la perception qu'on peut avoir du film, et il est loin d'être le seul à travailler dans cette zone d'ailleurs.
Ce que je veux dire c'est que sur la question fiction/documentaire, son film exprime clairement qu'il se pose en dehors de ça, qu'une lecture de son travail par ce prisme là n'amène nulle part.
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MessagePosté le: Ven Mar 30, 2012 10:00    Sujet du message: Répondre en citant



Bestiaire/Los Animales.
Denis Côté/Paola Buontempo

Les deux films ont beaucoup en commun. La question du regard sur l’animal en particulier, une forme très maîtrisée, et puis des scènes et des situations communes (un zoo, un taxidermiste).
Bestiaire est le plus radical d’une certaine manière. Il propose un enchaînement de plans fixes sur des animaux enfermés dans un zoo. Chaque cadre défini un espace d’apparition et d’existence différentes pour chaque animal, en réinventant à chaque fois un angle, une disposition de l’animal, une proposition de jeu entre la caméra et l’objet.
La force du film, c’est de faire apparaître la profonde étrangeté des animaux, leur irréductible et imperméable singularité. Ils appartiennent à un autre monde, impossible à déchiffrer, en dehors de toute compréhension. Ce zoo canadien, c’est Pluton. Bestiaire libère les animaux de cette lassante anthropomorphie, loin de toute psychologisation ou sentimentalisme, il met en lumière leur faiblesse, la domination des hommes, mais aussi leur puissance mystérieuse, et décrit combien homme et animaux cohabitent mais ne se rencontrent pas. Après avoir vu War Horse de Speilberg, moi ça m’a fait du bien.

Los Animales a un dispositif plus complexe mais développe une proposition plus simple. Passé une intro sur des maquettes de ville en forme de note d’intention faiblarde, Paola Buontempo réussit à réactiver la sauvagerie des animaux en cage grâce à un travail du son et de la lumière (une nuit trouée par un faisceau de lumière où apparaissent furtivement les animaux), et à donner tout la dimension de sidération que peut contenir l’apparition d’un éléphant ou d’un lion.
Dans un deuxième temps, l’exposition d’animaux empaillés, figés et dévitalisés, installe une dialectique un peu entendue mais qui n’enlève rien à la réussite de l’ensemble (surtout le film est court, ce qui lui évite de devenir pesant sur ce point).

C’est peut être un peu bête de jouer ces deux films l’un contre l’autre alors que ce sont deux réussites. J’ai été plus frappé par l’ouverture dégagée par la mise en scène de Bestiaire (alors qu’elle pourrait au contraire s’effondrer sur elle-même, elle frise d’ailleurs la complaisance dans les premières minutes) mais enfin le travail des deux films sur le regard et la distance face aux animaux m’a enthousiasmé (ça ma lavé de tous ces collages sentimentaux qu’on peut trouver par ailleurs).
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MessagePosté le: Mer Avr 25, 2012 16:55    Sujet du message: Répondre en citant

le yougo' a écrit:
Tiny a écrit:

faut pas pousser mémé là quand même. il est en plein dans le malentendu, cf les réactions contrastées dans la salle au moment du débat.
il sait bien ce qu'il fait en ne disant rien et il en joue.


Non ce n'est pas du malentendu. Son dispositif lui permet une mise en scène rigoureuse sur des éléments très précis. La révélation de ce dispositif ne change strictement rien à ce qu'il réussit dans son film. De ce point de vue il ne joue sur aucun malentendu. Ce qu'on a vu est bien ce qu'il y avait à voir, aucun twist ne vient invalider le film. Les réactions dans la salle exprimaient une surprise, mais enfin ça ne remet pas du tout en cause la perception qu'on peut avoir du film, et il est loin d'être le seul à travailler dans cette zone d'ailleurs.
Ce que je veux dire c'est que sur la question fiction/documentaire, son film exprime clairement qu'il se pose en dehors de ça, qu'une lecture de son travail par ce prisme là n'amène nulle part.


Bon j’ai envie de revenir sur ce film, parce que je suis allé un peu vite là-dessus et qu’il pose des problèmes qui ont pu diviser autour de moi.
Je préviens tout de suite que ce qui suit dévoile une grosse information sur le film que le réalisateur a souhaité ne pas révéler à ses spectateurs, ni avant, ni pendant le film, à peine dans son générique de fin (mais le doute est encore permis). Il fallait l’entendre en débat pour en avoir le cœur net. Quand j’ai vu le film, je savais déjà de quoi il retournait et je pense que ça m’a permis de me dégager de certaines questions qui parasitent selon moi le film. On peut donc faire le choix de respecter le vœu du réalisateur et arrêter la lecture ici, on peut aussi s’en foutre et continuer.

Pour se rendre un peu compte du film, la bande annonce ici :
http://www.dailymotion.com/video/xpehbf_east-hastings-pharmacy_shortfilms

Donc voilà, il se trouve que le réalisateur n’a pas pu filmer à l’intérieur d’une de ces pharmacies, il a donc décidé d’en reconstituer une. Les « client » sont de vrais patient, qui rejouent pour la plupart les situations qu’ils ont vécus (chacun avait la liberté de jouer ce qu’il voulait, scènes vécues ou pas, le réalisateur a fait son choix ensuite dans les scènes qui lui paraissaient les plus « vraies »). La pharmacienne est une actrice.
Donc un dispositif qui flotte franchement dans les eaux troubles qui délimitent la fiction du documentaire. Pour ma part, le contrôle du contexte et des possibilités techniques d’un tournage de reconstitution permettent au réalisateur de s’affranchir (dans un premier temps) de toute question de rapport au réel, d’un « faire avec » une situation mal maîtrisée, pour plutôt se concentrer sur un principe de mise en scène très précis. Il est remarquable que dans un dispositif qui lui laissait la liberté de tourner exactement ce qu’il voulait, qui lui ouvrait un nombre d’options de mise en scène très large, Antoine Bourges ait décidé de réduire sa grammaire de mise en scène à trois valeurs de plan fixes et immuables (par ailleurs il diversifie en fait ses plans lorsqu’il filme les patients assis dans la salle d’attente, mais le cœur du film peut se réduire au seul champ/contre-champ autour de la vitre). Il installe ainsi un système très rigoureux (mais pas inflexible, des scènes en sortent régulièrement, pour mieux y revenir) qui développe un jeux de séparation/lien entre les deux plans du champ/contre-champ, et qui théorise en quelque sorte toute une tension de la rencontre et de l’empêchement, de la fonction et de l’humain.
Oui mais alors ce sont des vrais malades, qui sont dans une vraie misère sociale, qu’est ce que c’est que ce film qui fait de la théorie et des figures de styles sur la détresse des gens ?
En gros c’est la question qui revient le plus souvent. Une séquence par exemple est mise en avant par un ami (il peut répondre s’il veut, ça peut dynamiser le forum) : Une femme vient au comptoir pour demander sa dose de médicaments. La pharmacienne lui dit que ce n’est pas prévu pour aujourd’hui, elle doit revenir demain, comme prévu par le planning. La femme rétorque que demain elle sera dans une autre ville, avec son fils qu’elle n’a pas vu depuis longtemps. La pharmacienne répond alors qu’elle peut toujours appeler la pharmacie de cette ville, elle sera alors fournie sur place. La femme ne veut pas, elle ne veut pas que son fils la voit aller à la pharmacie, dans cette situation.
Toute la scène fonctionne sur l’insistance de la femme à vouloir établir un rapport humain avec la pharmacienne, elle lui rappelle que ça fait plusieurs années qu’elles se côtoient dans ce lieu, qu’elle peut avoir confiance, qu’elle peut comprendre son problème. La pharmacienne peine à maintenir son détachement, puis finalement donne une demi-dose à la patiente.

Cette description un peu longue pour expliquer le reproche que peut faire mon ami : la femme explique clairement qu’elle ne veut pas que son fils soit au courant de la situation, ou plutôt que son fils la voit dans cette situation (on peut imaginer qu’il sait déjà tout ça). Or c’est précisément ce que fait le film, il la montre comme ça, en plan rapproché, dans la durée, pas floutée pour un sou, en pleine lumière, et le film a installé cette sidération dés le départ, on est dans une telle proximité et une telle frontalité avec ces gens qu’ont peu se demander comment cette caméra peut se retrouver là, comme ça, sans tact ni délicatesse pour ce qu’elle filme, et en plus tout ça dans des scènes de plus en plus dramatiques. On en arrive à penser ce film dégueulasse et immoral.
On ne sait pas ce qui s’est passé entre les malades et le réalisateur. Une règle tacite en documentaire voudrait qu’on respecte un minimum ce qu’on filme, on ne dénature pas la parole, on préserve le contexte des situations, on est fidèle à ceux qui ont accepté d’être filmé. C’est une question de rapport, j’ai déjà pu dire que selon moi c’est un aspect important de la mise en scène en documentaire, que celle-ci soit en lien avec le rapport installé avec ceux qu’on filme. Mais justement, ces rapports sont singuliers à chaque film, et chaque film invente et construit ses propres règles.
Qu’est ce qui fait que la scène décrite plus haut ne m’a pas choqué ? Au fond c’est un peu mystérieux, et c’est ce qui fait que pour moi le film est réussi, parce qu’il réussit ça. Il m’a semblé très clair que le réalisateur ne rompait aucun pacte en filmant la femme. C’est peut être sa position affirmée devant la caméra, la franchise de sa présence à l’image qui laisse penser qu’elle veut être filmée, c’est peut être le dispositif de mise en scène forcément voyant (au moins deux caméras, posées très près des gens, qu’on imagine visibles) qui installe l’idée pour tout le monde que chacun sait qu’il est filmé, que le pacte est conclu, c’est peut être aussi le fait que le propos du réalisateur n’est pas de révéler une situation, il ne fait pas un travail de journaliste, aucun scoop à balancer. Il n’est clairement pas dans une démarche de mettre en lumière ce qui serait caché, aucune raison de mettre dans son film une scène dont il sait qu’il n’a pas l’autorisation ou le droit moral de le faire, pas de fin qui justifierait ce genre de moyen… toujours est il que réussir à construire une place pour la caméra à l’intérieur d’un film qui ne soit pas violente pour ceux qu’elle filme, alors même que ceux là sont dans une positions de faiblesse, c’est sûrement ça la réussite de la mise en scène du film.
Bourges se détourne de la dualité fiction/documentaire pour installer un espace autre et se concentrer sur une dialectique, un élément formel réduit, un B-A BA du cinéma démultiplié par des effets de reflets, des visages qui s’inscrivent sur des visages, et c’est toute une tension du rapport à la fonction qui apparaît.
La morale d’un film, ou celle que doit avoir le réalisateur, c’est une morale interne, qui s’articule avec les modes de représentation, le sujet, les situations filmées, et les enjeux plastiques et formels que le film se choisi. Il n’y a pas a priori de règle, disons qu’il y a d’abord des rapports (réalisateurs/personnes, mise en scène/sujets, films/spectateurs…), et que ce n’est que de ça qu’il peut y avoir trahison ou mensonge.
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Dernière édition par Carton le Mer Fév 27, 2013 12:06; édité 2 fois
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