Bronislas dans le coma profond

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Posté le: Mer Juil 07, 2010 14:58 Sujet du message: Les Petits Ruisseaux (Pascal Rabaté, 2010) |
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Après Riad Sattouf et Les Beaux Gosses l'an dernier, c'est au tour d'un autre auteur de bande-dessinées, Pascal Rabaté, de passer derrière la caméra pour y adapter un de ses albums, Les Petits Ruisseaux. Je ne vais pas multiplier les comparaisons entre les deux auteurs, car c'est un exercice périlleux, mais malgré tout, on peut dire qu'ils ont réussi tous les deux à s'extraire du média papier pour faire deux vrais films, tout en retranscrivant leur univers et leur personnalité immédiatement. Certes leurs deux univers sont différents : le premier a une esthétique qui m'a vraiment étonné, suscitant l'attirance et la répulsion tout à la fois, mêlant des éléments des années 80 (Fade to Grey de Visage en bande-son, les vieux catalogues La Redoute plus que douteux), des années 90 (j'y vois le collège que j'ai connu, avant qu'il ne soit envahi par les nouvelles technologies, les portables, ordinateurs, où les lieux de sociabilité sont bien plus autour du distributeur de bananes (!), dans le bus et dans les cours d'immeubles que dans les chambres et salles de jeu en réseaux actuels), tandis que le second évoque avec sincérité cette France du vide où le temps et l'espace se déploient différemment, plus lentement, à travers cette voiturette orange, croisement improbable entre un caddy de golf et une mobylette, et que toute personne y avant séjourné reconnaîtra immédiatement. Néanmoins, les deux se rejoignent dans leur traitement sans emphase ni pathos des amours de jeunesse et de vieillesse.
Voilà ce qui me permet de passer à la critique proprement dite du film. Ce qui me faisait un peu peur avant de voir le film, et qui m'a rassuré dès les premières minutes, c'est qu'on évite un film plein de pathos, qui nous narrerait l'horreur d'être vieux, solitaire, de ne plus savoir comment on avait fait avant, etc. On évite l'autre extrême, à savoir l'histoire d'un super papy qui nierait son âge, ou qui chercherait à le faire, et l'exhibition gratuite d'une vulgarité qui détonnerait un peu.
En fait, Prévost est étonnant de retenue, presque dans un contre-rôle, quand il incarne ce vieux englué dans sa routine, qui renvoie au placard sa naïveté et ses craintes pour réapprendre à vivre. J'ajouterais une mention spéciale pour les deux rôles féminins, qu'on essaye de deviner plus jeunes, chacune ayant sa personnalité, ses activités, ses affinités, loin d'une vision unilatérale qu'on est tenté d'avoir lors qu'on parle de la vie des vieux. Pour moi l'épisode le plus faible est celui où il rencontre des squatteurs. Même s'il n'est pas caricatural, il a un petit quelque chose de bizarre que je ne saurais vraiment expliquer. On a malgré tout l'impression d'un fossé entre Prévost et les autres acteurs, alors que l'auteur cherche à nous montrer le contraire. J'ai l'impression que ça vient des acteurs qui jouent les squatteurs. Enfin, l'humour, s'il n'est pas omniprésent, passe à travers des trouvailles visuelles (sa voiturette en est une, la façon dont il voit les femmes à un certain moment aussi, la description de la vie dans le village et des activités de ses habitants) qui sont à mon avis bien trouvées, mais que je laisse découvrir à ceux qui ne l'ont pas encore vu.
Je ne suis pas trop note, mais je pense que ça équivaut à un 4-4,5/6. |
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