Inscrit le: 08 Fév 2010 Messages: 2209 Localisation: Over the top
Posté le: Mer Sep 01, 2010 17:42 Sujet du message: Electra Glide in Blue (James W. Guercio - 1973)
Le film s’ouvre comme une profession de foi : en gros plans, des mains organisent ce qui ressemble à un suicide sophistiqué.
Mais après le coup de feu, elles réapparaissent, dans une dernière action presque anodine. Sans qu’on ait pu faire la différence, elles ont changé de statut. Mains d’une victime, de quelqu’un qu’on plaint, elles sont devenues celles d’un bourreau.
Si on peut croire à un canevas de who dunnit classique, on réalise rapidement que le sujet n’est pas là. Guercio va nous parler d’une époque troublée, complexe, faite d’éclats lumineux et de trous noirs, de grandeur et de décadence. Et il nous montrera – croyez-le ou non – une béance dans le cœur de l’Amérique.
Construit dans une ambivalence, le film ne cesse d’avancer des assertions et de les contrarier aussitôt, refusant les facilités narratives et les discours trop simples, et met sur les épaules de son personnage central un fardeau : rendre compte de son temps. Fasciné à la fois par la mythologie et les valeurs réactionnaires de l’Amérique profonde, l’ordre et les rêves de réussite sociale et matérielle, le film est aussi tourné vers l’humain, la spiritualité, tant il donne l’impression parfois d’être à la recherche du sens de la vie.
Son héros est magnifique. Petit flic qui avale les kilomètres de bitume sur le plateau de l’Arizona, juché sur sa moto rutilante, John croit à la loi et à l’ordre, et soigne jusqu’au fétichisme tous les éléments de son costume, conscient de la place qu’il lui donne dans la société. Il croit aussi au rêve américain et n’aspire qu’à devenir détective pour travailler avec sa tête, plutôt que sur sa machine. Pour s’élever socialement, être un intellectuel plutôt qu’un ouvrier.
Guercio fait une confiance absolue à son personnage, corps de cinéma, et le fait traverser le film comme s’il marchait sur un fil, entre sérieux et grotesque, défendant coute que coute sa vision du monde et ses contradictions. Robert Blake lui apporte son assurance et son charisme pour le ramener du côté des vivants.
Plein et inégal, sombre mais profondément humaniste, le film se termine dans une apothéose dramatique – un plan magnifique – baignée dans une musique orchestrale légèrement cheezy et sur l’asphalte, entre les rocs de Monument Valley, gardiens inébranlables d’une mythologie.
Dernière édition par Tiny le Mar Sep 28, 2010 11:02; édité 1 fois
Posté le: Mer Sep 01, 2010 17:47 Sujet du message:
Grand film nihiliste au final, même si ce terme là collé sur ce film peut (et a fait) faire beaucoup discuter. Je reviendrai surement sur ton texte intéressant.
Hier en revoyant encore une fois To live and die in L.A, j'ai de nouveau noté la référence au film, que je remarque et oublie à chaque fois. Dans le commissariat y a carrément une affiche en carton de Blake grandeur nature. Quoi de plus naturel pour un film encore plus explicitement noir et nihiliste.
Posté le: Mer Sep 01, 2010 17:58 Sujet du message:
Sur le plan final ? Je ne vois pas pourquoi, il me semble que ce qui est vu est justement en décalage avec ce qui est entendu, coller ça là dessus c'est quand même tout sauf une apologie, plus un espoir perdu. Mais nihiliste le terme ne correspond peut être pas ouais. On y reviendra, mais dans le fond tu as raison, c'est un terme que je colle trop facilement... Je le crois sincèrement pour le Friedkin par contre.
Inscrit le: 08 Fév 2010 Messages: 2209 Localisation: Over the top
Posté le: Mer Sep 01, 2010 18:03 Sujet du message:
ah pour le friedkin carrément. humanisme et nihilisme c'est complètement antinomique. et quand il y a un humanisme profond chez guercio, des raisons d'espérer, il n'y a qu'un mur en guise de sortie de secours chez friedkin. incompatible.
Posté le: Mer Sep 01, 2010 18:04 Sujet du message:
Je suis d'accord pour tout le film, mais disons qu'à la fin je ne vois plus trop de raison d'espérer dans le Guercio. Je ne vois pas où tu trouves de l'espoir dans ce plan final.
Inscrit le: 08 Fév 2010 Messages: 2209 Localisation: Over the top
Posté le: Mer Sep 01, 2010 23:20 Sujet du message:
Phèdre a écrit:
Je suis d'accord pour tout le film, mais disons qu'à la fin je ne vois plus trop de raison d'espérer dans le Guercio. Je ne vois pas où tu trouves de l'espoir dans ce plan final.
nan ya pas d'espoir à proprement parler dans le plan final, mais ya tout le film avant. et disons que j'y ai senti un amour de la vie, ne serait-ce que chez wintergreen, qu'on verrait jamais chez le personnage principal d'un friedkin, encore moins dans to live and die in la.
Toutes les heures sont au format GMT + 2 Heures Aller à la page 1, 2Suivante
Page 1 sur 2
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum