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Bibliothèque pornographique
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Carton
dans le coma profond


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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:24    Sujet du message: Bibliothèque pornographique Répondre en citant

Ici j’ouvre un topic de BD porno, parce que quitte à être un forum de branleurs, autant faire de la branlette sur un objet à priori conçu dans ce but.

Et on commence avec :



JUSTINE ET L’HISTOIRE D’O, de Guido Crepax, chez Evergreen.

Y’a pas beaucoup d’auteurs de BD érotique qui ont laissé un nom. En Italie, pour faire vite, il a Manara et Crepax.
Dans les années 70, Guido Crepax déboule avec panache dans la bande dessinée de genre, Très dans son époque et en même temps complètement novateur dans la forme, il fait feu de tous bois, Sf, horreur, aventure, et surtout érotisme.
Ou Porno ? Disons porno, parce que le cul est très représenté, crument même si élégant, parce que cette élégance n’a rien à voir avec un voile ou un décadrage du sexe, Crepax ne rougit pas, il y va franchement mais n’abdique pas la forme. Disons porno aussi parce que si parfois il y a une pudeur, un trait elliptique, c’est moins par souci de ne pas franchir la ligne que par un souci de style, d’effet graphique, ce qui n’empêche pas le trash par ailleurs ; disons donc que le porno n'exclue pas le style et que Crepax s’attache aux deux en même temps, que chez Crepax le style n’est pas une représentation déguisée ou décalée du sexe, un cache sexe quoi, mais une forme, une mise en forme du sexe en dehors des questions de pudeur ou de morale, mais plutôt tourné vers des questions de rythme et de picturalité (la morale cependant est une question du scénario bien sûr, c’est un des sujets majeurs de ces deux récits).
Picturalité (ça existe ce mot ?) parce que l’unité chez Crepax n’est pas la case ou la séquence mais la page comme surface, toute sa mise en scène se fait à partir d’un regard général qui embrasse la page dans son ensemble. Le premier effet recherché n’est pas la clarté du récit mais la vibration visuelle de la page lorsque le lecteur la tourne, comment sa totalité frappe l’œil. Dans un second temps seulement on peut se plonger dans la narration. Celle-ci n’est d’ailleurs jamais aisée, souvent brouillée ou rendue difficile par le dessin très détaillé.

C’est particulièrement vrai dans la première histoire de ce recueil qui en compte deux. Dans Justine, adaptation fidèle de La Nouvelle Justine de Sade, tout semble se confondre, les drapés très présents, les cheveux, les poils, les plis des visages, on met un certain temps à débrouiller tout ça pour comprendre la case. Si tout se mélange, c’est que l’histoire de Justine ne semble pas connaitre de limite dans les ressorts édifiants de ses aventures, et qu’à un moment, les corps entre eux sont absurdes, un gribouillis, un agglomérat confus.

Spoiler:



Les livres de Crepax se donnent difficilement, ce n’est pas une lecture facile et l’auteur semble ne jamais chercher à séduire son lecteur. D’autant plus que les textes choisis sont particulièrement durs et sombres, et que Crepax se plait à appuyer ce côté-là, visages grotesques de gargouille pour les hommes, visages et corps cadavériques pour les femmes (une constante d’ailleurs dans son œuvre), situations sadiques et violentes racontées cliniquement et dans la longueur, et moralité toute relative des histoires (c'est-à-dire très morales au bout du compte, mais enfin faut s’accrocher quand même).
Il y a comme quelque chose d’indigeste dans ce livre de Crepax, un trop plein qui repousse d’abord, empêche l’accès instantané dont on a l’habitude en BD, fera le tri entre les lecteurs onanistes et les autres, et seulement ces derniers auront le courage de s’atteler à la lecture (enfin y’a des petits malins qui sauront bien jongler avec cette double lecture, une seule main mais deux cortex). De toute façon le monde est pourri, les forts se servent des faibles, on ne jouit des corps que dans la douleur, et les BD de Crepax se lisent dans l’effort, tout est logique.

Histoire d’O est un peu différent, formellement surtout, puisque c’est là qu’on voit que Crepax a une formation d’architecte.
On dit partout qu’il a une écriture cinématographique, c’est un peu vrai, mais c’est surtout faux, c’est une écriture d’architecte, qui n’est pas dans la séquence, pas dans la narration, mais dans l’agencement et la cohabitation des cases en soi. Dans Histoire d’O d’ailleurs, une sorte d’emphase se fait, quelque chose de moins clinique et de plus lyrique, qui se joue non pas dans le récit mais bien dans les symétries et asymétries, les espaces pleins ou vides, les rappels de formes, la page comme une structure d’abord, un récit ensuite.

Spoiler:



Et parfois, la page entière semble mise en pause, temps suspendu ou simultané qu’on explore, pour le simple plaisir d’organiser des cadres

Spoiler:



(alors pour l’écriture cinéma, le mouvement et le temps on repassera, de toute façon « cinéma » c’est ce qu’on dit de la BD quand elle impressionne mais qu’on veut pas chercher pourquoi).
Quant à Manara, il arrive dans la décennie suivante et s’emploiera à reprendre, détourner, affadir et aplatir les travaux de son ainé.


Dernière édition par Carton le Sam Fév 13, 2010 19:47; édité 1 fois
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:25    Sujet du message: Répondre en citant

Nabuquedeleaucesoir a écrit:



J'ai lu ça. La mention "réservé aux adultes" n'est pas usurpée: c'est vraiment du pornographique, parfois pur et dur. On aurait même pu rajouter "pour adultes avertis", car c'est parfois vraiment dégueulasse.
Enfin bon, le principal atout de Happy Sex, c'est évidemment le thème et la façon de l'aborder: généralement les BD humoristiques traitant de sexe se cantonnent à de l'"érotique coquin" faisant la part belle à la plastique avantageuse de quelconques pin-ups (je pense notamment aux strips de Dany). Donc bon, une BD qui fait du vrai porno "rigolo" avec des "vraies" gens dans des "vraies" situations, ça ne court pas les rues.

De plus, il y a le dessin de Zep, certes dans la pure tradition humoristique franco-belge "gros nez" mais reconnaissable entre mille, qui sied parfaitement à l'esprit de l'oeuvre. Un auteur connu et reconnu qui s'aventure dans des contrées où on ne l'attendait pas, de la belle colorisation non informatisée (de plus en plus rare pour que ça mérite d'être souligné), une couverture soignée: c'est sûr, au feuilletage, c'est de la belle ouvrage (avec le supplément de prix qui va avec: 15 euros), qui vise donc un public autre que celui habitué à offrir de la "BD coquine de supermarché". (traduction: c'est donc un bouquin pour bobos)

Mais là où le bât blesse, c'est que les gags en eux-mêmes ne sont pas extraordinaires. Je ne dis pas qu'ils sont mauvais, mais par leur niveau, ils ne volent pas plus haut que l'énorme masse des BD "à chute en bas de page" qui emplissent les étalages de nos hypers. Ça se lit, on sourit parfois, mais c'est jamais le fou rire (sauf pour deux-trois situations où j'ai ri de bon cœur... et que j'ai d'ailleurs déjà oubliées). Bref, "sympa mais pas transcendant". Je préfère encore du Jim.
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:26    Sujet du message: Répondre en citant

Le truc que j'aime bien là dedans, c'est qu'on peut sentir dés 'Les filles électriques" que Zep est tenté d'aller vers une représentation plus directe du sexe. Le type a su reconnaitre son désir et se servir de son succès pour imposer ce livre à son éditeur. Il a une certaine liberté éditoriale et n'hésite pas à s'en servir.
Après c'est une BD complètement anecdotique par ailleurs, dommage que Zep en soit resté à des blague de VDM.
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:28    Sujet du message: Répondre en citant



SQUEAK THE MOUSE, de Massimo Mattiloi, 2 tomes chez Albin Michel.

Tiens, un autre italien. Et un autre auteur qui vient de la bande dessinée pour enfant. Sauf que contrairement à Zep ça a une tout autre tenue. Déjà ses livres pour enfants, Vermetto Sigh et surtout M le Magicien (publié dans Pif fin des années 60) sont des chef-d’œuvre de non-sens et de poésie absurde, un dessin très simple, un cadre indéfini de nature enchantée, et un ton humoristique à la fois naïf et expérimental, proche d’un Krazy Kat aux couleurs flashies blindé de jeux sur la mise en page et les niveaux de lectures.

Squeak the Mouse vient plus tard, dans les années 80, Metal Hurlant est passé par là, et Mattioli, après avoir créé en Italie la revue Cannibale lance avec d’autres la revue Frigidaire pour un public résolument adulte. C’est là qu’il développe les aventures de Squeak the Mouse, décalque de l’univers de Tex Avery ou de Tom et Jerry mais de manière perverse.
Mattioli reprend le principe et la structure des aventures de poursuite de ces dessins animés, un chat, une souris, l’un chasse l’autre et parfois l’inverse. Il pousse a bout la logique sadique de ses modèles en tirant vers le gore, les coups font saigner et les tripes sortent abondamment. Complètement dans un mouvement de contre culture propre à l’époque, le chat est fan de Vidéodrome et de Evil Dead, et quand une souris meurt elle revient en zombie (dédicace Neuftrou).



Le principe de cette BD complètement muette, c’est une dynamique burlesque, mais qui réalise le fantasme du genre, c'est-à-dire aller jusqu’au bout de la violence, la représenter pleinement et frontalement, sans que jamais cela prenne le pas sur une certaine légèreté, les têtes sautent, les corps sont découpés, mais là aussi rien n’est grave, et la course poursuite sera sans fin.

Bien sûr, aller jusqu’au bout de la perversion, c’est aussi sexuer les personnages, là où par exemple Krazy Kat restait flou, là où Tom et Jerry préféraient un déni confortable (oui parce que après tout, Jerry est une fille, ne l’oublions pas), Mattioli y va à fond et met du sexe partout où il peut (c'est-à-dire entre deux coups de couteau).
Le sexe suit la même esthétique, quelque chose de transgressif, un fantasme qu’on réalise, mais sans aucune culpabilité, dans une joie complète. Marrant de noter que dans les scènes porno, Mattioli reprend là aussi la grammaire du genre, scénario grossiers, gros plans, crescendo orgasmique et combinaisons improbables. Le tout dans son style graphique rond et lumineux, que ce soit dans le gore ou le porno, Mattioli a bien compris que la morale ou la culpabilité n’ont rien à faire là dedans, c’est un monde enfantin et pulsionnel, sans complexe ni zone d’ombre.

Spoiler:



Le plaisir de lecture vient surtout de là, du refus de la profondeur et du plaisir du passage à l’acte.
Et puis aussi, mine de rien, de la qualité de l’écriture, qui développe des péripéties complexes et rocambolesques sans jamais donner l’impression du moindre effort, comme une évidence.

Là où Zep fait violence à son image en cherchant un autre public sans changer de style et trouve laborieusement la solution du même mais pornographique (en gros, Titeuf avec des poils), Mattioli trouve la cohérence de son œuvre dans le grand écart, passe de Pif au porno gore en travaillant les mêmes références et la même esthétique, mais les creuse ailleurs et produit de la nouveauté. C’est l’angle qui change, un déplacement du regard, un geste qui évolue avec son époque et un prolongement du style dans la différence apparente. Pas un surplace donc, mais la suite logique de son travail.


Dernière édition par Carton le Sam Fév 13, 2010 19:48; édité 1 fois
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:29    Sujet du message: Répondre en citant

Une vidéo d'Eric Loret (celui qui a fait l'interview de Ruppert et Mulot dans le topic approprié) ici : http://angouleme.blogs.liberation.fr/avent/2010/01/hisaichi-yamada.html

On y voit des images de Crepax (voir plus haut) et de Magnus (à venir). Une sorte de bande annonce du topic.
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:29    Sujet du message: Répondre en citant

Toujours de Loret, des images de Pichard (ça c'est pour dans longtemps), une belle utilisation d'un logiciel de lecture, et une belle utilisation d'un objet promotionnel : http://angouleme.blogs.liberation.fr/avent/2010/01/30-janvier.html
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:31    Sujet du message: Répondre en citant



NECRON de Magnus, chez Cornelius.
7 Tomes prévus, 6 de sortis Pour l’instant.
Oh tiens encore un italien, décidemment. Magnus, de son vrai nom Roberto Raviola, commence à dessiner des BD de genre (polar, SF) en format poche dans les années 60 après avoir passé son diplôme des Beaux Arts. Il se distingue par un trait classique, aux noirs élégants et de bon goûts, pervertis par une ambiance et un esprit Gallio du meilleur effet. C’est au début des années 80 qu’il commence la série Necron, éditée d’abord par Albin Michel, puis repris par Cornélius récemment (voir la note en bas de page).

Nécron suit l’histoire de Frida Bauer, Jeune et vénéneuse scientifique de génie, un rien perverse, qui déteste les hommes et kiffe le sexe mais seulement avec les morts. Elle invente donc son monstre de Frankenstein à elle, bien membré et faiblement pourvu question cervelle (celle d’un scénariste de BD d’horreur en fait, même si Frida aurait préféré le cerveau d’un dessinateur). Le résultat c’est Nécron, un monstre à la bite géante, complètement crétin, qui va servir à la fois à punir l’humanité veule et corrompue, et à assouvir les désirs de la savante qui a enfin son propre mort-vivant/esclave sexuel.
La série fonce à toute allure, fait intervenir des nouveaux personnages pour mieux les trucider, mêle un dessin précis et raffiné avec un univers grotesque et porno-gore, toujours au second degré mais jamais vraiment parodique.

Spoiler:



Ici le sexe et la tripaille vont de paire, jamais vraiment dans le but d’exciter le lecteur ou de le dégouter, mais plutôt dans une optique politique et rocambolesque, c'est-à-dire appuyer l’aspect féministe (femme maitresse, machos dézingués, phallus débarrassé de la notion de puissance et réduit à l’état de dildo) sans jamais sortir du cadre des fumetti neri, évènements grotesques et raccourcis scénaristiques dans le seul but de maintenir le rythme.
Rapidement, le carnage produit par Nécron, sexuel et meurtrier, devient vraiment réjouissant, culminant dans le tomme 3 avec une aventure dans un train complètement improbable et hallucinante. Et souvent Nécron tend vers le burlesque, dédramatise la violence avec des scènes vraiment comique.



Les désirs débordent de tous les sens, éros et thanatos frontaux, ça prend toute la place et ça fait du dégât, la série fonctionnant surtout par accumulation de corps, violés puis explosés, accumulation de plus en plus difficile à gérer pour les 2 protagonistes.
Un chef d’œuvre low profile, qui ne dépasse jamais sa dimension de roman de gare, mais qui à l’intérieur de ça impressionne par sa qualité et sa folie exubérante. Très loin de la tiédeur molle de la production actuelle, une série haute en couleur (les couvertures fluo de Cornelius l’ont bien compris) à chopper dans sa bibliothèque municipale si celle-ci a les couilles de les proposer.

(Bonus autobio : )
Spoiler:



Note de bas de page :

Il faut parler de l’édition de Cornélius, qui sauve Nécron de sa précédente édition par Albin Michel faite en dépit du bon sens, rentrée au chausse pied dans le format Album qui ne lui convenait pas, et du coup remontée/redessinée/dénaturée d’une manière que c’est honteux de voir ça, aucun respect, larchuma sur eux, j’interdis quiconque d’acheter quelque album que ce soit édité par ces salopiaux.

L’édition originale, 3 doubles pages :



L’édition Albin Michel, défoncée en une seule page :



Rien que les deux dernières cases, l'une montée à l'envers et l'autre tronquée pour l'intégrer à la première. Bouh !


Dernière édition par Carton le Sam Fév 13, 2010 19:49; édité 1 fois
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:32    Sujet du message: Répondre en citant

l'admin super Hot qui ressemble à Jericho Cane a écrit:

Sinon, y a le manga porno.


Tutafé.



MUTANT HANAKO de Makoto Aida, edition Le Lézard Noir.
Livre un peu particulier puisqu’au départ il n’était pas prévu pour être édité autrement qu’en photocopie à peu d’exemplaires. Makoto Aida est un artiste contemporain surtout habitué aux galeries. Il travaille principalement sur les figures d’expression populaire, les comics, les mangas, détournés vers le trash, en peinture principalement. Mutant Hanako présente d’ailleurs en fin de volume quelques œuvres du bonhomme (bof bof).
Dans le cas de cette BD, on dirait qu’en fait l’auteur a trouvé la forme la plus évidente de son travail, peut être aussi la plus convaincante. Obnubilé par la sous culture et la guerre du Pacifique, il mélange ici le tout en un manga porno gore nationaliste propagandiste.
La jeune Hanako, originaire d’Okinawa, reçoit souvent la visite de l’empereur en rêve qui lui annonce qu’elle est l’élue et qu’elle sauvera l’empire d’une défaite face au démon américain. Irradiée à la suite d’une bombe atomique lancée par l’ennemi, elle se retrouve avec des supers pouvoirs et va enfin bouter les envahisseurs hors du Japon.

Ici plus qu’ailleurs, le ton est outrancier, à la fois complètement parodique et premier degré. Aida pousse son récit vers des situations absurdes et trash, viols collectifs, combats de monstres, fascination pour l’anal et le border line résolument provocant. Les personnages sont des plus caricaturaux, japonais valeureux et impuissants, américains monstrueux et phalliques (Roosevelt est une multi-bite géante qui a le pouvoir d’hypnotiser sexuellement).

Spoiler:



On se demande rapidement quel est l’intérêt de tout ça. Une fois que le propos iconoclaste est posé, on comprend très vite où l’auteur veut en venir avec son univers mi-cynique mi-fasciné par les formes qu’il manipule (y’a clairement un plaisir de sa part à pousser à fond les manettes du fascisme nationaliste et du gonzo trash). D’autant plus que finalement, ces formes et cette critique se retrouvent déjà dans pas mal de mangas à la base, là c’est juste une démarche post moderne dont l’auteur semble presque s’excuser en post-face.

Là où vraiment le livre réussit quelque chose, c’est dans sa forme même, un dessin d’enfant qui glisse parfois vers des images très travaillées mais qui reste la plupart du temps au niveau du crayonné bancal, et les couleurs aux crayons qui donnent à l’ensemble une naïveté étonnante, quelque chose de vraiment dynamique, une l’énergie que le grotesque du projet n’aurait pas sans ça.
Il y a l’idée d’un inconscient du manga, la pulsion des « images dérisoires » à l’état brut (dirigée vers un objet et pas une personne, évidemment), un brouillon bouillonnant, dégueulasse et littéral, d’avant l’autocensure ou d’avant que la raison vienne mettre de l’ordre dans tout ça.
Une curiosité.

Spoiler:



(Je me souviens du regard effrayé de mon libraire à la caisse, qui me dit « mais tu veux vraiment acheter ça ? ».
O Pierre, t’as des goûts de vieux et depuis que ton ange est parti tu vends des mauvais livres, mais quand je passais dans ta boutique à minuit tu m’offrais le café et on fumait des clopes en écoutant David Bowie.
Époque bénie.
)


Dernière édition par Carton le Sam Fév 13, 2010 19:50; édité 1 fois
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:33    Sujet du message: Répondre en citant

Tetsdecul a écrit:
le yougo a écrit:
(oui parce que après tout, Jerry est une fille, ne l’oublions pas)


HEIN ?! Shocked




Topic passionnant, sinon !


Oui alors en fait c'est pas clair. Dans un épisode Jerry tombe amoureux d'une souris femelle. Mais dans d'autres Jerry se maquille et porte des sous vêtements féminins.
Soit trav' soit lesbienne en fait.

Sinon merci, je sais que j'écris pour au moins une personne maintenant.
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MessagePosté le: Jeu Fév 11, 2010 3:34    Sujet du message: Répondre en citant

Tetsdecul a écrit:
le yougo a écrit:
Oui alors en fait c'est pas clair. Dans un épisode Jerry tombe amoureux d'une souris femelle. Mais dans d'autres Jerry se maquille et porte des sous vêtements féminins.
Soit trav' soit lesbienne en fait.


Moi je dis trav', c'est plus logique.

le yougo a écrit:
Sinon merci, je sais que j'écris pour au moins une personne maintenant.


Oui mais continue à mettre des images, hein, sinon je viens plus.


Lol.
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MessagePosté le: Lun Fév 15, 2010 13:25    Sujet du message: Répondre en citant



LA NOUVELLE PORNOGRAPHIE de Lewis Trondheim, édition L’Association.

Ça faisait un bout de temps que Trondheim parlait d’un projet de BD porno, on se demandait bien à quoi ça pouvait ressembler.
Il a sorti ce petit livre, collection Patte de Mouche, l’année où il était président d’Angoulême, peu de temps avant de se barrer de l’Asso. C’est certainement son dernier travail intéressant (avec l’Ile Bourbon 1730, mais c’est Appollo au scénar).
C’est une BD à clef, qui demande un déchiffrage de départ, de comprendre un code avant d’en saisir tout le sens. C’est peut être d’ailleurs le message de la couverture, ce voyeur dans le noir, qui nous dirait que le sens dépend de l’œil qui regarde, sous un certain angle (apparemment, le plus frontalement possible).
Ce sens peut se donner facilement ou non, certains comprennent dans la seconde, d’autre ont lu le livre en gueulant à l’arnaque, à l’abstraction absurde.
Pourtant tout est là, point d’abstraction, mais un récit en 13 figures.



Car l’œil n’en était pas un. On peut dire que La Nouvelle Pornographie raconte, de manière subjective et « intérieure » les aventures sexuelles et amoureuses d’une femme. La figure I serait la vue subjective d’un vagin se faisant pénétrer, la Figure II y ajoute l’anus, et la figure V la bouche.
Les trois orifices ayant été introduits (ahaha), Trondheim fait ensuite avancer son récit sur la forme de la variation, plus ou moins inventive, plus ou moins inattendue.



Le plaisir principal de la lecture se trouve bien dans cette dimension de déchiffrage, le sens le plus trivial apparaissant des pages a priori obscures et abstraites. Il faut noter néanmoins que Trondheim abandonne de plus en plus le côté schématique de son dessin pour faire apparaitre petit à petit des formes plus détaillées (un poing, un outil de dentiste, jusqu’à l’apparition finale, pas loin d’un dessin de Blanquet). Car finalement, une fois que le lecteur a décodé son système, plus rien ne sert de le maintenir à tout prix. C’est donc le récit qui prime sur le concept au bout du compte, les déboires du personnage jusqu’à une sorte de morale finale (vaguement réac d’ailleurs, mais bon…).
Trondheim aime bien contourner les représentations attendues et se permet de valser d’un régime à l’autre, porno, morale, système, abstraction, récit, tout ça fonctionne ensemble et sauve le tout du simple exercice de style.
Trondheim est mort. Il fut très fort.


Dernière édition par Carton le Lun Fév 15, 2010 15:02; édité 1 fois
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Zagriban
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MessagePosté le: Lun Fév 15, 2010 14:43    Sujet du message: Répondre en citant

Tu fais bien d'expliquer les images. J'aurais pas compris sinon.

Sinon critique intéressante, comme toujours.


Dernière édition par Zagriban le Lun Fév 15, 2010 15:19; édité 1 fois
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Zahad le rouge
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MessagePosté le: Lun Fév 15, 2010 14:43    Sujet du message: Répondre en citant

c'était pas terrible l'île bourbon
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Oxyure
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MessagePosté le: Lun Fév 15, 2010 14:59    Sujet du message: Répondre en citant

Zahad le rouge a écrit:
c'était pas terrible l'île bourbon


C'était même hyper faiblon.
_________________
Oxyure. Joue la carte Cow-Boyienn​e de l'obsession

"Liber sed fidelis"
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Carton
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MessagePosté le: Lun Fév 15, 2010 15:05    Sujet du message: Répondre en citant

C'est corrigé zagriban (mais enfin tu vas pas relever toutes mes fautes à chaque fois, on n'a pas que ça à faire).

Ile Bourbon c'est très sympa, faut pas déconner, c'est le meilleur bouquin sorti chez Shampoing !
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