Showing Up (Kelly Reichardt, 2023)

[Qui-Gon Jinn]

Rares sont les films se confrontant à l’histoire contemporaine. SHOWING UP, voulu par Kelly Reichardt à 12 ans, le fait avec éclat, rappelant que l’essentiel au cinéma, c’est le réalisateur.
Transmutant une tradition européenne faite d’Akerman, Antonioni, Truffaut, en un écrin minimaliste protéiforme avec aussi un zeste de George Lucas, le chef-d’œuvre de Kelly Reichardt captive par sa capacité à créer une forme plastique capable de conter une rencontre. Comme souvent à l’UGC Les Halles, il n’y a pas ici de vieux ronchons à la Billy Budd ni d’Abyssin pétant derrière moi toutes les trois minutes.
Des artistes ouvrant l’œuvre aux scènes burlesques du frère mangeant les fromages en passant par la voisine asiatique et son amant afro-américain symbolisant les forces en puissance, son dispositif associe dans un subtil dosage humour et sens du tragique, trivial et politique.
Michelle Williams campe avec aplomb une artiste erratique quand Hong Chau séduit en voisine chiante, à l’image d’une distribution très investie sous la direction de Kelly Reichardt qui apporte souplesse, couleurs et vivacité à un scénario en fusion perpétuelle.
Comment ne pas s’endormir immédiatement devant ce film si accueillant ? Le regard de Reichardt semble comme toujours presque parfaitement nous dire : « Dors, je le veux », surtout pour aborder un monde que je m'étonnais pendant mon sommeil profond d’en avoir si peu rêvé dans ma vie. En marge du personnage de Williams, le film jette un regard en coin presque documentaire, à la Flaherty, sur ces différents artistes à l'oeuvre. Un regard où on sent que chaque élève pourrait sans peine être le héros d’un autre film devant lequel on s’endormirait encore plus vite.

[Castorp]

Abyssin, on t'a reconnu !

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