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Les coquillettes (Sophie Letourneur, 2012)

 
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Baldanders
dans le coma profond


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MessagePosté le: Sam Oct 27, 2012 22:15    Sujet du message: Les coquillettes (Sophie Letourneur, 2012) Répondre en citant



Avec ce film, Letourneur avait clairement l’ambition de faire une comédie, de faire rire en continu. Elle a raté son pari pour plusieurs raisons.

D’abord beaucoup de gags sont poussifs, reposent sur un ridicule facile, par exemple les yeux écarquillés d’un type séduit par les héroïnes dans le train, ou quand une des filles réclame à une fête qu’on lui roule une pelle et qu’un petit mec tout moche (Benoît Forgeard) s’avance et se propose, airs gênés de tous… L’humour est forcé en permanence, avec pour conséquence que Letourneur n’arrive pas à produire une seule scène complète vraiment drôle. Même si quelques détails peuvent faire rire, ils sont noyés.

Autre raison : le comique se détache sur fond de bêtise. Pas grand-chose à voir avec La Vie au ranch qui reposait plutôt sur de l’inconscience (d’une bande de gamines friquées de 19 ans). Là, les filles ont 30/35 balais, sont obsédées par le cul, ressassent leurs difficultés à trouver un mec et coucher avec. A force, cette obsession (objet de chacune des scènes) leur donne l’air débile. Si ça avait été un film sérieux, elles n’auraient été que de pitoyables névrosées, mais comme le film cherche à éviter à tout prix tout sérieux, elles sont juste idiotes et inintéressantes.

Dans La Vie au ranch, Letourneur avait de la distance vis-à-vis des jeunes qu’elle filmait. Ici, elle colle de près à ses trois protagonistes (beaucoup de gros plans) qui non seulement n’arrêtent pas de chercher des mecs, mais en plus en parlent tout le temps et avec tout le monde. Le film étant un flash-back (les trois filles se re-racontent leur virée à Locarno), on a donc le double de bavardage creux.

Je crois que les filles de La Vie au ranch amusaient vraiment Letourneur, et qu’au contraire son propre milieu ne la fait pas tant rire que ça. Le film aurait été beaucoup plus intéressant si elle avait fait le même travail que pour La Vie…, à savoir enregistrer les discussions entre festivaliers et en faire ressortir les côtés caricaturaux, drôles et confus. Là, le petit monde du cinéma n’est qu’un décor, elle ne s’y intéresse pas, elle fait semblant via son personnage de le traverser en s’en foutant, toute occupée qu’elle est à trouver un plan-cul, ce qui est évidemment invraisemblable. Comme c’est irréaliste (mais manque la stylisation du Marin masqué), elle force la note comique pour faire exister son film autrement que par sa teneur en réalité brute. Mais comme je le disais, les gags sont faciles, redondants, mal amenés, mal rythmés, sauf quelques-uns, trop peu.

Une découverte quand même : les talents de comédien d’Eugenio Renzi (!!).

Le projet a été monté à l’arrache et le tournage s’est fait dans l’urgence. J’espère donc que c’est une parenthèse et que Letourneur reviendra à ce qu’elle sait le mieux faire : filmer dans sa durée brute et son épaisseur réaliste l’énergie sans arrière-pensée d’une certaine jeunesse…


Dernière édition par Baldanders le Mer Sep 27, 2017 10:38; édité 2 fois
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Hello--Kitty
dans le coma profond


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MessagePosté le: Dim Oct 28, 2012 8:26    Sujet du message: Re: Les coquillettes (Sophie Letourneur, 2012) Répondre en citant

Baldanders a écrit:
Une découverte quand même : les talents de comédien d’Eugenio Renzi (!!).

Il joue qui ?

edit: ah OK, l'Italien.
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Hello--Kitty
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MessagePosté le: Dim Oct 28, 2012 8:49    Sujet du message: Répondre en citant

Je me disais que l'erreur est peut-être de ne pas avoir fait du film une vraie fiction, de faire jouer certains rôles par les personnes elles-mêmes, ou par des journalistes, etc. Parce que là où le film pourrait être une charge féroce (comment on vit de la culture ?), une fable réaliste avec un humour à l'Italienne (obsession pour le cul, concupiscence généralisée), il devient une sorte de regard sur soi-même plus ou moins faux où le spectateur s'interroge moins sur ce que l'on montre que sur ce que l'on cache (pour toi, c'est: l'intelligence - ce qui est assez vrai; pour moi c'est: une situation familiale plus compliquée que "je suis une réal de 35 ans, je cherche un plan cul en festival").
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MessagePosté le: Dim Oct 28, 2012 17:48    Sujet du message: Répondre en citant

Je trouve que le cadre (un festival de cinéma où les mêmes happy few se croisent d'année en année) se prête plutôt bien à une comédie. C'est une bonne idée. J'ai un peu de mal à cerner le sujet du film, mais il doit y en avoir un. Les personnages (3 filles plus ou moins copines), pourquoi pas... Je suis assez client des films sur les amitiés molles.

En revanche, je trouve que le style de Letourneur ne convient pas. En superposant les narrations (3 filles se re-racontent le festival quasiment heure par heure) et en multipliant les effets de montage, elle étouffe totalement son film: le spectateur n'a pas le temps de se balader dans le festival comme tout le monde parce qu'il est sans cesse ramené à la chronologie des faits et à l'efficacité des gags. Le style de Letourneur devient une mécanique, il ne respire pas. Déjà, Le marin masqué était absorbé par ses effets "à la Bref" (effet comique du montage ultra sec avant un plan qui s'étire; redondance assumée de la voix-off sur l'action visuelle). Le film devient comme une sorte de série télé où les personnages familiers ré-apparaissent de scène en scène et nous font rire parce qu'ils font systématiquement les mêmes choses, les mêmes erreurs. Les dialogues et les situations mutent en gimmicks (la fille qui raconte son anecdote sur Louis Garrel; le mec qui s'assoit tout le temps à côté de Camille).

Il faut reconnaître d'ailleurs à Sophie Letourneur un vrai talent pour inventer des noms qui sonnent familiers alors qu'on les entend pour la première fois, un peu comme des patronymes d'anciens copains d'école que l'on ré-entendrait. Elle sait aussi inventer ces titres improbables et irrésistibles (le titre du film de Louis Garrel, "La meule", m'a fait rire à chaque fois).

D'une manière générale, on voit que l'apparente plus grande maîtrise technique du film (mieux éclairé, mieux cadré, mieux monté) le dessert en comparaison de l'aspect brouillon, esquissé de La vie au ranch. Et quand le film se met à s'appuyer, comme tout le monde, sur le tube de M83, ça devient un film comme les autres.

Il y a ensuite le choix de voir la vie et les personnages uniquement sous l'angle de la superficialité. Ces 3 filles sont cultivées, sans doute cinéphiles, pas stupides, et pourtant elles ne parlent que de leurs plans cul / love foireux, elles se demandent ce qu'elles vont porter comme robe (Pas celle-là, je l'ai déjà mise à Belfort), dans quelles soirées elles vont aller, etc. L'intelligence des personnages est totalement occultée. A tel point que les seuls courts moments un peu réjouissants dans le film sont ceux où elles sont remises à leur place: 1) quand Goujeon répond à Letourneur qui se désole qu'il ne l'accompagne pas au dîner du film de Garrel qu' "effectivement elle aura l'air d'une pauvre meuf et puis c'est tout" 2) quand Carole la brune s'énerve contre Camille la blonde parce qu'elle est tellement conne qu'elle ne sait même pas préparer de la mozza (une parenthèse pour dire que cette actrice, Carole, est très belle, avec son beau sourire sur ses mâchoires carrées, ses allures athlétiques et ses marques de maillot de bain).

On sent que cette façon d'insister sur la sottise et la frivolité des personnages est une manière assez hypocrite d'attirer la sympathie en faisant montre d'auto-ironie: regardez, je suis Sophie Letourneur, je suis capable de mettre-en-scène mon discours nul sur scène à Locarno, je suis consciente que je suis tellement inadaptée à la vie que je ne sais même pas me préparer à bouffer, etc. Sauf qu'on se doute bien qu'elle n'est pas si conne que ça, et à l'arrivée c'est tout bénéfice pour elle: non seulement c'est une fille sympa qui fait des films sympas, mais en plus elle sait rigoler d'elle-même.

Bref (c'est le cas de le dire), j'ai beaucoup rêvé à un autre film en regardant Les coquillettes: un film sur la vie des festivaliers qui serait bien moins verrouillé et bien plus féroce, un film dans lequel éventuellement on pourrait se reconnaître, en identifiant notre médiocrité, d'accord, mais aussi nos connivences ou notre habileté ou notre sincérité.

Il faudra bien dire aussi que ce film est d'une misogynie sans nom. Le fait que les personnages masculins sont laids et pitoyables ne constitue sans doute pas une circonstance atténuante. On peut s'attendre à ce que les journalistes cinéma qui participent au film (Jean-Marc Lalanne, Inroks; Julien Gester, Libération; Isabelle Régnier, Le Monde; Eugenio Renzi, Independencia) ne le signaleront pas mais, le film ayant l'habileté d'exhiber ses collusions, on ne pourra même pas le leur reprocher.

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Baldanders
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MessagePosté le: Dim Oct 28, 2012 18:04    Sujet du message: Répondre en citant

D'accord avec toi, d'un bout à l'autre. Ton texte beaucoup moins paresseux que le mien le complète et l'enrichit joliment, merci. Et ce qui est drôle, c'est que je n'ai pas mis de note (parce que je n'aime pas les notes) mais que je me suis quand même posé la question, et je me suis dit que j'aurais mis "entre 1 et 2".
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Hello--Kitty
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MessagePosté le: Dim Oct 28, 2012 18:20    Sujet du message: Répondre en citant

C'est toujours plus facile de passer en deuxième !
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Baldanders
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MessagePosté le: Lun Oct 29, 2012 21:16    Sujet du message: Re: Les coquillettes (Sophie Letourneur, 2012) Répondre en citant

Hello--Kitty a écrit:
L'intelligence des personnages est totalement occultée.


Tout à l'heure, pendant la sieste, ça m'est revenu.

Le problème de la voie qu'emprunte Letourneur (régression & hystérie), c'est qu'elle doit transformer le film lui-même, en le rendant dingue, farfelu. Sinon, ça finit forcément sur le plan final morose des Coquillettes, à savoir une poubelle dans laquelle on jette les pâtes froides. Tout ça laisse en effet un triste goût de plat sans originalité et vite refroidi.

Letourneur aurait dû jeter un oeil sur le meilleur film jamais réalisé sur la régression féminine assumée et poussée jusqu'à ses extrémités.



Les Petites Marguerites
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Hello--Kitty
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MessagePosté le: Mar Oct 30, 2012 15:32    Sujet du message: Re: Les coquillettes (Sophie Letourneur, 2012) Répondre en citant

Baldanders a écrit:
la régression féminine assumée et poussée jusqu'à ses extrémités.

C'est intéressant de voir Les coquillettes comme ça, même si ce genre de sujet ne m'est pas du tout apparu quand je regardais le film. C'est vraiment problématique, ce double récit. Il faudrait monter le film sans la partie "les 3 filles racontent", ou le monter sans la partie "festival" (mais là la mise-en-scène ne tiendrait pas), pour voir.

Je n'ai pas vu Les petites marguerites.

Bon, nous voilà en haut des références sur google quand on fait une recherche sur le film, c'est embêtant.
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Hello--Kitty
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MessagePosté le: Mer Mar 13, 2013 18:07    Sujet du message: Répondre en citant

Sur IMDB, sur 25 personnes qui ont noté le film, il y en a... 18 qui lui ont attribué la note de 1/10.

Shocked

Ça sent le groupe de haters de Letourneur qui se sont mobilisés.
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Conufs
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Messages: 1399

MessagePosté le: Mer Mar 13, 2013 18:47    Sujet du message: Répondre en citant

Hello--Kitty a écrit:
Sur IMDB, sur 25 personnes qui ont noté le film, il y en a... 18 qui lui ont attribué la note de 1/10.


Un peu de sociologie de terrain:



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Hello--Kitty
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Inscrit le: 03 Nov 2010
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MessagePosté le: Mer Mar 13, 2013 19:19    Sujet du message: Répondre en citant

Les femmes et les Américains n'aiment pas.
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