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Dark Horse (Todd Solondz, 2012)

 
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Trollope
dans le coma profond


Inscrit le: 04 Oct 2011
Messages: 637

MessagePosté le: Mer Sep 12, 2012 22:11    Sujet du message: Dark Horse (Todd Solondz, 2012) Répondre en citant



Ce qui est intéressant dans le film, c'est la manière dont on est censé s'identifier au personnage principal. C'est le but visé par Solondz qui sait que malgré ses efforts dans ce sens ça ne va pas marcher. Ensuite, je trouve qu'il y a beaucoup de contresens dans les critiques que j'ai pu lire, ou de paresse. Dans la critique de Yal Sadat sur Chronicart, en lui reprochant son absence de distance, il soupçonne Solondz de se servir de son personnage pour dire des banalités sur la solitude et la tristesse en général, ce qui est stupide. C'est vrai que c'est très tentant, quand Walken dit à son fils "I give you tough love", une réplique qui est peut-être poignante, d'y voir un commentaire du réalisateur. De l'amour dur - j'adore cette réplique cela dit, et elle dit bien ce que fait Solondz depuis le début, un cinéma cruel, empathique et complètement dénué d'ironie.
Pour en revenir au "personnage identificateur", il est vraisemblable que personne ne s'identifiera au personnage principal, alors qu'idéalement c'est ce que Solondz voudrait qu'on fasse dans une certaine mesure, comme je l'ai dit. Est-ce que le personnage est vierge? Est-ce que c'est la première fois qu'il embrasse une fille? (la scène qui est belle est "gâchée" par Selma Blair qui commente et dit ;"oh merci, ça aurait pu être pire"- son côté couper court au sentimentalisme). C'est la différence avec 40 toujours puceau, où le point de vue adopté est mêlé d'un légère condescendance, le film retourne ça de manière bizarre quand Seth Rogen et Paul Rudd constatent à la fin à quel point Steve Carrell a l'air préservé par rapport à eux. De toute façon, le film ne veut pas dire grand-chose, à part que Catherine Keener est une très sympathique actrice.
Un autre dialogue que je trouve très bien a lieu dans ces scènes de rêve où le rythme devient un peu plus ample, alors que Solondz installe une espèce de faux rythme dans les deux premiers tiers du film, avec des scènes qui tiennent plus du théâtre ou de la bd, quand le héros dit à la secretaire "vous ressemblez à une cougar" et qu'elle répond "c'est parce que je suis vieille et que j'aime bien baiser des jeunes que tu dis ça" et lui se met à balbutier "euh non, je veux dire". Il veut dire le cougar, l'animal, mais il pense au mot qui sert à désigner les femmes mûres qui se tapent des jeunes.
Je suis étonné quand je vois des critiques insister sur la laideur des polos ralph lauren, le truck jaune du héros ou sur la lourdeur du procédé qui consisterait àncommenter l'action avec des chansons idiotes. Pour moi, ça a presque une valeur neutre, ça ne veut rien dire, et c'est traité comme tel.
(Désolé pour le relâchement de l'écriture, je déteste écrire en ce moment- je vais tâcher de régler ça).
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Hello--Kitty
dans le coma profond


Inscrit le: 03 Nov 2010
Messages: 2053

MessagePosté le: Ven Sep 14, 2012 12:43    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne saurais pas répondre sur l'identification, c'est une notion qui a toujours été assez floue pour moi.

Trollope a écrit:
Je suis étonné quand je vois des critiques insister sur la laideur des polos Ralph Lauren, le truck jaune du héros ou sur la lourdeur du procédé qui consisterait à commenter l'action avec des chansons idiotes. Pour moi, ça a presque une valeur neutre, ça ne veut rien dire, et c'est traité comme tel.

J'ai vu trois ou quatre films de Solondz et ils m'ont toujours plu. En général, je n'aime pas beaucoup les cinéastes "de la surface", les cinéastes "de l'apparence", les cinéastes "lisses", ceux qui s'intéressent à l'aspect des choses (comme François Ozon en France, si vous voyez ce que je veux dire). Mais je trouve qu'il y a dans l'expression de Solondz quelque chose de totalement juste et terrifiant. Les polos de couleur et le gros 4X4 jaune poussin dont tu parles, il arrive à en faire des objets mornes, éteints, presque lugubres. Il y a dans la vie telle que Solondz la représente une affirmation colorée dérisoire, un élan pop morose. De ce point de vue, c'est un des seuls réalisateurs à bien se tirer du passage au numérique, ce format où les brillances deviennent factices et déprimantes. Quoi de plus angoissant que ces plans répétés, toujours les mêmes, où Abe gare sa voiture devant la maison de ses parents ?

Plus une couleur est affirmée, plus elle est suspecte, plus elle cache quelque chose. Méthode appliquée à la direction d'acteurs - impression que dans les films de Solondz il y a d'un côté les personnages sous antidépresseurs, de l'autre les personnages sous coke (ou diet coke en l'occurrence). Abe m'a rappelé le personnage de John Goodman dans The Big Lebowski: ce sont tous les deux des obèses mal-aimés qui sont étonnamment catégoriques, sûrs d'eux, violents (la scène dans les toilettes avec l'ex). Abe, en bon Américain, ne peut survivre qu'en s'inventant des fictions improbables (et pas seulement les rêves éveillés de la deuxième partie), mais ça marche ! Il affirme, et ça passe. Il dit une pauvre phrase à une fille lors d'une fête et il affirme que c'est "une rencontre". Et quand il dit à la secrétaire qu'il sort avec une fille et qu'il va l'épouser (alors qu'on sait qu'il vient de se prendre un vent), il est seulement en avance de quelques scènes. C'est un violeur.

C'est pour ça que je ne trouve pas le film condescendant. Les musiques idiotes qu'on entend ne sont pas employées de manière ironiques (je suis totalement d'accord avec toi pour dire que les films de Solondz sont sans ironie), elles sont juste du carburant pour Abe, une manière de tenir. Pour moi, ces musiques sont du coaching, et je ne saurais mieux résumer le film qu'en disant qu'il présente un monde épouvantable où tous les sentiments bienveillants (le rapport mère-fils, le rapport amoureux) ont dégénéré en coaching.
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Hello--Kitty
dans le coma profond


Inscrit le: 03 Nov 2010
Messages: 2053

MessagePosté le: Ven Sep 14, 2012 13:03    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne pense pas qu'il se mette au-dessus de ses personnages, en effet.

Ce sont des films où tous les gens sont malades. C'est toujours ce qui me frappe. La perversion est généralisée.

Il est peut-être roublard, oui, au sens où il aime bien piéger les attentes du spectateur, décevoir ses espoirs humanistes (ah tu croyais que ce personnage-là était positif, eh bien non, tiens, il est comme les autres mais il cachait son jeu, c'est un putain de malade comme tout le monde).
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Trollope
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Inscrit le: 04 Oct 2011
Messages: 637

MessagePosté le: Ven Sep 14, 2012 15:57    Sujet du message: Répondre en citant

Le film ne t'a pas enthousiasmé, non? En même temps, ce film n'a rien d'enthousiasmant. Ce serait louche s'il l'était, non ?

Hello--Kitty a écrit:
Je ne saurais pas répondre sur l'identification, c'est une notion qui a toujours été assez floue pour moi.


Le seul type dont j'ai entendu parler de ça, c'est Whit Stillman dans une interview à propos de Metropolitan. C'est marrant parce que je tape "identification character" sur google, je tombe sur une interview récente à propos de Damsels in Distress.

Hello--Kitty a écrit:
Abe m'a rappelé le personnage de John Goodman dans The Big Lebowski: ce sont tous les deux des obèses mal-aimés qui sont étonnamment catégoriques, sûrs d'eux, violents (la scène dans les toilettes avec l'ex).


John Goodman joue dans Storytelling, donc c'est amusant que tu dises ça. Mais il joue un père "bien dans sa peau", donc pas de rapport, je ne sais pas si tu l'as vu.
Ce n'est pas facile de se prendre de sympathie pour Abe, mais j'ai trouvé qu'à certains moments il avait une diction assez musicale. C'est déjà ça.
Tous les personnages sont très mal lotis. Je ne trouve pas judicieux le dialogue qui dure trois plombes sur la rocade, et la meilleure route à prendre; ça devient trop caricatural et je ne comprends pas très bien ce que veut faire Solondz. C'est trop limpide, il y a un problème. De la même façon, Selma Blair a un rôle insupportable mais une super réplique, complètement hors de propos ("Ah Mahmoud, toi et tes clichés post-marxistes"). Dans ce que j'ai pu lire sur internet, les gens ont plus tendance à citer "j'ai eu une discussion avec Mahmoud sur skype" qui m'a fait ni chaud ni froid, comme on dit.

Baldanders a écrit:
Hello--Kitty a écrit:

C'est pour ça que je ne trouve pas le film condescendant.


Pour dire vrai, je n'ai jamais trouvé les films de Solondz condescendants. Je cherchais ce que je voulais dire en disant ça (sur l'autre fil), et "mesquin" serait plus proche, et "roublard" aussi. Mais je n'ai pas encore vu Dark Horse.


Mesquin, je ne trouve pas trop, roublard sans doute. Il y a une telle faculté d'empathie (ce n'est pas le "compassionnel" dont tu parlais) dans ses films qu'à la limite on peut le trouver prétentieux. Dans son deuxième film, il y avait un pédophile traité de manière empathique. Dans son avant-dernier, il sortait de prison, couchait avec Charlotte Rampling et allait voir son fils, d'après mes souvenirs, pour lui dire que son problème était génétique et qu'il fallait qu'il y fasse attention. L'acteur avait changé entretemps d'ailleurs, il s'était virilisé - je veux dire, Solondz avait changé d'acteur. On peut trouver Solondz roublard, et il l'est dans la mesure où ses films sont des tentatives de manipulation du spectateur, je serais même tenté de dire que ses films sont édifiants, mais il a l'honnêteté de finir en disant, c'est impossible d'édifier quiconque ou d'être édifiant, "je n'aimerais pas vivre dans mes rêves", etc.

Christopher Walken est hyper maquillé dans le film. On dirait qu'ils lui ont mis du rouge à lèvre. C'est pas mal.
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Hello--Kitty
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Inscrit le: 03 Nov 2010
Messages: 2053

MessagePosté le: Lun Sep 17, 2012 10:11    Sujet du message: Répondre en citant

Trollope a écrit:
Le film ne t'a pas enthousiasmé, non?

Non, c'est plutôt le moins bon de ceux que j'ai vus.

Trollope a écrit:
John Goodman joue dans Storytelling, donc c'est amusant que tu dises ça. Mais il joue un père "bien dans sa peau", donc pas de rapport, je ne sais pas si tu l'as vu.

Oui, je l'ai vu. Je ne me souvenais pas de Goodman et, en vérifiant, je m'aperçois qu'il n'est pas dans le film. Tu confondais peut-être avec Giamatti (dont je ne me souviens pas bien non plus) ?

Quand j'évoquais la possible "roublardise" de Solondz, je pensais en particulier à Storytelling: je me souvenais de la fin du segment avec Selma Blair, quand elle se fait prendre par son professeur noir.

Selma Blair, je l'ai beaucoup aimée dans Dark Horse, même si je regrette que son personnage soit autant négligé. C'est une comédienne que je ne connais pas bien. Elle me fait penser à Neve Campbell.

Trollope a écrit:
Je ne trouve pas judicieux le dialogue qui dure trois plombes sur la rocade, et la meilleure route à prendre; ça devient trop caricatural et je ne comprends pas très bien ce que veut faire Solondz. C'est trop limpide, il y a un problème.

Oui, à ce moment-là Solondz perd toute l'originalité de son trait. N'importe qui pourrait écrire ce dialogue. C'est comme un premier jet. On dirait "les parents vus par les adolescents".

C'est un peu comme lorsqu'il fait de Abe un geek: on attend mieux que ça.

Trollope a écrit:
Dans son avant-dernier, il sortait de prison, couchait avec Charlotte Rampling et allait voir son fils, d'après mes souvenirs, pour lui dire que son problème était génétique et qu'il fallait qu'il y fasse attention.

Encore une scène typique de la malice de Solondz. Si mes souvenirs sont bons, tu es très inquiet parce que tu penses que le père va s'en prendre (sexuellement) à son fils aîné, et en fait tu découvres que le père cherche seulement à protéger le plus jeune des frères. Dans cette scène tu découvres (comme je disais plus haut) que tout le monde est malade (le père, le fils), ce qui me semble être le motif dramatique préféré de Solondz - exactement comme dans la scène de Storytelling que j'évoquais où tu découvres que le prof noir utilises le racisme dont il est lui-même victime comme un stimulant sexuel pour baiser des petites blanches. Il y a toujours une sorte de déconvenue très forte pour le spectateur dans ces scènes.
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Trollope
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Inscrit le: 04 Oct 2011
Messages: 637

MessagePosté le: Lun Sep 17, 2012 15:46    Sujet du message: Répondre en citant

Je pense aussi que c'est le moins bon, mais on dirait un film vidé de toute substance. Soit les scènes s'étirent, soit elles ne durent pas assez longtemps, la plupart sont filmées en gros plans et champ contre-champ sans imagination (mais je trouve que Solondz te fait bien ressentir la présence de l'interlocuteur, quand Walken coupe le chemin à son fils, il a un mouvement de la tête de gauche à droite très frappant, quand Abe regarde Mahmud, l'ex de Selma Blair, on voit bien qu'il ne fait pas très attention à elle à ce moment là), puis le film s'alanguit dans les scènes de rêves, pas folichones comme on dit, mais compte tenu de l'imaginaire supposé de Abe ça aurait pu être pire, comme dit Blair. Le film fait un peu penser au Bartleby de Jonathan Parker, qui a ses fans (pas Jerzy apparemment qui espère ne le voir jamais - ci-dessous, une image de Jerzy au 3ème congrès des gens qui espèrent ne jamais voir Bartleby).



Ah, je n'ai pas rêvé. On va finir par me rendre fou. (J'ai vu John Goodman dans le dernier Kevin Smith, il n'est pas encore méconnaissable, mais il a beaucoup maigri).

Oui c'est le thème de Solondz. Dans la scène de rêve qui se passe dans la voiture avec la mère et son frère, elle lui dit:"tu as toujours été le plus difficile, quand tu étais bébé, tu ne cessais pas de pleurer." et il répond "mais ce n'est pas de ma faute." C'est l'idée que les personnages s'aveuglent profondément sur leur sort, ou non, et les spectateurs par la même occasion comme tu viens de l'expliquer.
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