Posté le: Jeu Mar 30, 2017 19:06 Sujet du message: Orpheline (Arnaud des Pallières, 2017)
Baldanders, je passe la première couche…
Portrait d’une femme à quatre âges de sa vie. Petite fille de la campagne, prise dans une tragique partie de cache-cache. Adolescente ballottée de fugue en fugue, d’homme en homme, puisque tout vaut mieux que le triste foyer familial. Jeune provinciale qui monte à Paris et frôle la catastrophe. Femme accomplie enfin, qui se croyait à l’abri de son passé. Quatre actrices différentes incarnent une seule et même héroïne. (synopsis officiel)
C'est très décevant. Ça se présente malheureusement comme une sorte de rêve cannois, le bouquet d'actrices et d'acteurs étincelants ne produisant pas grand chose d'autre qu'un beau tapis rouge, un rêve cannois prenant racine dans le cinéma américain indépendant (l'enfance dans la casse, le duo de pères buveurs de bières filant vers la rivière, tout ça entre Jeff Nichols, Laura Kasischke et Greg Araki pour la partie "tout le monde a compris que c'est dans le congélateur que ça se passe") et allant accoucher de quelque chose en Roumanie… Pourquoi la Roumanie ? Parce que c'est l'idée qu'on se fait d'un pays triste et pauvre, là où on ne voudrait finir pour rien au monde ? Tout est glauque et chic, comme ça, les hommes sont violents ou libidineux, les filles font des pipes facilement, même si tu ne t'es pas essuyé après avoir pissé. Ça pourrait rappeler Lætitia Masson, en fait, le romanesque en moins. Ou Audiard sans la capacité à capter le grand public.
La photo d'Yves Cape est comme d'hab, un peu chiante et chichiteuse, sous-ex comme il faut, très contrôlée dans les contre-jours (avec cette façon de poser sur l'extérieur qui rappelle Godard, toujours très présent dans le style de des Pallières, dans la lumière, dans les raccords, dans les décors aussi pour revenir à la casse)… Je l'ai préférée dans la partie "enfance", plus brillante et saturée (voir la photo au-dessus, un plan du film qui a beaucoup de gueule). On a le sentiment que c'est toujours filmé trop serré, et que tout est trop cut, avec un montage-son un peu gras. Dès que les personnages entrent dans un couloir on entend les néons à donf, ou l'ascenseur qui ronronne quand ils sont sur un palier. Le son a d'ailleurs un peu de mal à faire vivre ce que la caméra ne filme pas (la faune de l'hippodrome par exemple), ceci expliquant peut-être cela (c'est filmé trop serré du coup le son doit compenser et élargir l'espace en l'incarnant un peu trop).
C'est sinistre, très très sérieux. Ils tirent tous des mines… Du coup, le réalisme du film est un peu bancal, parce qu'on ne se prend pas autant au sérieux dans la vie, c'est pas vrai*. Quand l'héroïne se fait embaucher au centre de paris hippiques, par exemple, ils sont tous en train de bosser en faisant la gueule. On a l'impression de voir Nikita quand elle débarque pour sa première mission d'espionnage et que toute la bande la méprise. L'autre truc qui m'a surpris, pour continuer sur la question du réalisme, c'est le choix des musiques in. Tout est de très bon goût, y compris dans la boîte de nuit pourrie, la musique que va écouter le videur chez lui ou celle qui passe au mariage de la tante (alors qu'on a pourtant compris que c'était des beaufs puisque la mère regarde une série AB Productions à la télé). Filmer des prolos brutes et cons, ok, ça passe plutôt bien à l'écran, mais on va quand même pas foutre leur musique pourrie dans le film ! Je sais pas, des trucs comme ça ça finit par se remarquer et on sent qu'on va chercher ces personnages pour de mauvaises raisons, ça devient gênant.
Beaucoup d'effet tombent à plat, dès le début. Quand Gemma Arterton (assez mauvaise par ailleurs) sort de prison en tailleur blanc étincelant ( ), je n'ai pas compris si c'était censé être spectaculaire, drôle ou magique. Du coup, c'est un peu ridicule, on se dit juste "Bah c'est pas possible…" Et alors ça s'enchaîne, on se dit "Bah puisqu'ils prennent 4 actrices sans que ça se justifie vraiment, pourquoi ils prennent une actrice de 25 ans pour jouer une gamine de 13 ans ? Pourquoi pas une actrice de 13-16 ans ?" Ensuite la fugueuse déscolarisée qui n'a pas l'air d'avoir inventé la machine à courber les bananes devient directrice d'école à 27 ans ( )… On dira juste en passant qu'elle a "repris ses études" quand elle avait la petite vingtaine. Bon voilà, je crois que c'est juste naze et sinistre et sans aucun humour et même pas si beau que ça, en fait.
Ah oui, je n'ai pas compris un truc :
Spoiler:
Qui est mort pendant le vol et comment ?
* Pour le coup, Solène Rigot s'en sort bien, avec son sourire un peu fragile, qui fait pitié.
Posté le: Ven Mar 31, 2017 17:41 Sujet du message:
Hello, Kitty. Pas le temps malheureusement de passer une deuxième couche très épaisse, mais valzeur se fera un plaisir quand il rentrera de vacances. Le film est tout ce que tu dis, et même pire. Pour répondre à ta question : je crois me souvenir (l'avant-première à la Fémis commence à dater) que l'assassinée est une employée par hasard témoin du vol.
Posté le: Ven Mar 31, 2017 19:18 Sujet du message:
Ah oui c'est vrai que A. des Pallières c'est l'an 1 de La fémis, comme de nombreux autres réals (dont L. Masson d'ailleurs, non ?)
Baldanders a écrit:
l'assassinée est une employée par hasard témoin du vol.
J'ai l'impression d'avoir raté un épisode, je vois la fille sur le brancard mais je ne me souviens pas d'un incident avec elle. D'ailleurs je n'ai pas très bien compris quel était la stratégie du vol.
edit : je lis dans une interview du réalisateur que la boussole de sa mise-en-scène, c'est que "tout est vu du point de vue de l'héroïne", ce qui pourrait expliquer pourquoi on ne voit pas l'épisode de la fille qui se fait buter accidentellement… mais ça ne fonctionne pas avec la séquence d'ouverture de la sortie de prison de Gemma Arterton, par exemple.
Pour info, je lis aussi qu'il s'est obligé à n'utiliser qu'une seule focale (sans doute le 70mm? ou le 50?), ce qui explique pourquoi il ne peut pas trop filmer l'environnement.
Comme souvent je suis d'accord avec Sophie Avon, qui écrit dans Sud-Ouest, simplement :
Citation:
Curieusement et malgré des actrices différentes, le personnage est unidimensionnel, soumis au regard d’un cinéaste qui ne la regarde qu’à travers un corps objet, sexuel, bafoué ou maternel.
La mise en scène sophistiquée, la fragmentation du rôle et la dramaturgie à rebours paraissent du coup autant d’essais formels voués à un récit asphyxiant, sans émotion ni lumière.
Posté le: Dim Avr 09, 2017 18:42 Sujet du message:
Hello les Flans (si vous préférez, vous pouvez changer le F par un G),
Je rentre de vacances et vous savez quoi ? : j'ai à peu près tout oublié de ce film qui était très très pénible !
Je me souviens :
- que dans une scène de baisouille (ou suçouille) en voiture, on entend le cuir des banquettes qui fait scrouitch scrouitch, on entend même que ça (et le dialogue horrible) comme si les micros avaient été placés dans les sous-vêtements des acteurs...
- que je n'avais pas capté le coup du congélateur (je pensais que des méchants Roms avaient kidnappé les deux moutards, ou plus sûrement qu'ils avaient préféré déserter d'eux-mêmes ce film grotesque))
- que rien ne fonctionne, hormis l'interprétation très vaillante de Solène Rigot. Exarchopoulos et Haenel sont plus que jamais des fausses valeurs du jeune cinéma français
Par ailleurs, je contresigne tout ce qu'a écrit Hello Kitty...
Posté le: Lun Avr 10, 2017 10:57 Sujet du message:
valzeur a écrit:
- que je n'avais pas capté le coup du congélateur (je pensais que des méchants Roms avaient kidnappé les deux moutards, ou plus sûrement qu'ils avaient préféré déserter d'eux-mêmes ce film grotesque).
Ceci dit, il me semble qu'on voit la gamine chercher les garçons dans le congélateur au début. Dans mon souvenir elle soulève le couvercle quand ils jouent à cache-cache… A étudier.
valzeur a écrit:
- que rien ne fonctionne, hormis l'interprétation très vaillante de Solène Rigot. Exarchopoulos et Haenel sont plus que jamais des fausses valeurs du jeune cinéma français
Finalement Adèle Haenel ne tourne pas tant que ça avec les jeunes, elle tourne avec Téchiné (74 ans), les frères Dardenne (65 ans), Salvadori (52 ans), des Pallières (55 ans), Campillo (bientôt 55 ans lui aussi), Bonello (48 ans), Corsini (60 ans)… Restent Cailley - Quillévéré - Fehner, les vrais jeunes (35 ans).
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum