Tiny dans le coma profond

Inscrit le: 08 Fév 2010 Messages: 2209 Localisation: Over the top
|
Posté le: Lun Jan 31, 2011 18:33 Sujet du message: All That Heaven Allows (Douglas Sirk - 1955) |
|
|
C’est le premier film de Douglas Sirk que je vois. Pourtant il a toujours été dans le coin, Sirk. J’ai même souvent tourné autour (Far from Heaven de Todd Haynes, Mad Men qui dans une certaine mesure prolonge des thèmes chers à Sirk)… Profitant d’un congé obligatoire, je me suis enfin lancé. Et j’ai adhéré dès le générique d’ouverture…
Une consolation au piano, un plan d’ensemble sur une douce bourgade de Nouvelle-Angleterre, les teintes automnales et apaisantes du technicolor. Je me suis senti à la maison direct.
Cary est veuve depuis quelques temps déjà. Elle a deux enfants qui étudient loin de la maison et n’y reviennent que le weekend. C’est une femme de son époque et de son milieu. Elle se consacre donc à ses tâches ménagères et pour le reste, s’occupe comme elle peut. Elle croise un jour le regard de Ron, son jardinier, et se laisse séduire par son aura et son indépendance. Il est adepte des théories de Thoreau, ne donne d’importance ni à la réussite, ni à l’argent, et ne vit que pour lui. Mais bientôt, les foudres des conventions sociales s’abattront sur cette union et feront éclater l’évidence : ils ne sont pas faits l’un pour l’autre.
Rock Hudson est magnifique de virilité et de douceur. Son personnage est d’une grande beauté, construisant pièce par pièce, tout au long du film, le foyer que Cary appelle de ses vœux. Le foyer qu’elle aimerait tant retrouver, elle qui est condamnée par ses amis, par sa famille, à ne plus jamais aimer ou être aimée. En substance, son ami Harvey, 15 ans de plus qu’elle, qui la demande en mariage en lui disant qu’il a bien compris, « comme elle », que la compagnie et l’amitié étaient le plus important. Sa propre fille, qui lui dit après qu’elle ait rompu avec Ron, que ça vaut mieux comme ça, que de toute façon, elle n’était pas vraiment amoureuse. Ces répliques font tomber autour du personnage les barreaux d’une cellule dont elle aura du mal à s’extraire.
Bien sûr, il n’est pas question qu’elle tombe amoureuse d’un homme qui n’est pas inscrit au country club, un homme qui n’a pas pour objectif de réussir en affaires, et qui aime regarder pousser ses arbres. Un homme plus jeune, avec ça. Et beau. Certaines mauvaises langues pourraient trouver ça carrément indécent. Une femme respectable qui revendique sa sexualité, le plaisir charnel. C’est là où le film va le plus loin, clairement, dans le désir d’émancipation de son personnage et qu’il dépasse le cadre un peu balisé du mélodrame pour se ranger du côté de la satire sociale.
Quelques très beaux plans : Cary se reflète sur l’écran noir du poste de télévision que son fils vient de lui offrir, avec en voix off, le vendeur, qui lui promet les joies, les peines et la parade de la vie au bout des doigts.
Et puis le plan final avec le cerf. Je n’en dis pas plus pour pas spoiler. |
|